Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques arrêts et jugements de la jurisprudence administrative. Voici un extrait du prochain numéro :

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CERGY-PONTOISE, 10 juin 2025, M. D. (req. N° 2413880)

Carence et responsabilité de l’État pour mépris du droit au logement : 20 ans c’est vraiment long !

Aux termes de l’art. L. 300-1 du Code de la construction et de l’habitation : « Le droit à un logement décent et indépendant (…) est garanti par l’État à toute personne qui (…) n’est pas en mesure d’y accéder par ses propres moyens ou de s’y maintenir ». Ce véritable droit – subjectif et opposable – au logement, on le sait, fait l’objet d’un important contentieux – tant quantitativement que collectivement. L’intérêt du présent jugement (classé C+ au Recueil Lebon) est qu’il tente une innovation supplémentaire au bénéfice des demandeurs : la reconnaissance d’un préjudice moral, « distinct des troubles dans les conditions d’existence, né de la seule situation d’attente prolongée engendrée par l’inexécution de la décision de la commission de médiation (Comed) lorsque ce délai revêt un caractère excessivement long ».

Concrètement, c’est depuis 2003 que le demandeur, reconnu porteur de handicap, était en attente d’un logement social et depuis 2021 qu’il avait été reconnu prioritaire par la COMED du Val d’Oise. Toutefois, six mois après l’été 2021 où le droit au logement opposable lui avait été reconnu, il ne lui avait toujours pas été proposé de logement entraînant la saisine du TA de Cergy-Pontoise demandant la reconnaissance de la carence et de la responsabilité étatiques conséquentes. Le TA a rappelé dans son jugement qu’il n’existait pas de droit automatique à la mise en jeu d’une telle responsabilité de la puissance publique par ces mots : il n’y a « droit à réparation que si [le] logement est inadapté au regard, notamment [des] capacités financières et [des] besoins » du requérant et, en l’espèce, le juge a refusé de reconnaître la matérialisation de « troubles dans [les] conditions d’existence [du requérant] lui ouvrant droit à réparation ». Toutefois, et c’est ici la nouveauté soulignée, puisque la carence d’action étatique dans le logement, entraînait bien la reconnaissance d’une faute (pour manquement) et d’une responsabilité de la puissance publique, un autre préjudice est désormais recevable, outre celui, précité et matériel, dans les troubles des conditions d’existence (ici non retenu), un préjudice moral (…) ….

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