Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative.

Voici un extrait du prochain numéro :

CÉ, 15 novembre 2022, élections départementales du canton de Marseille 6 (461959)

Non-atteinte à la sincérité d’un scrutin malgré des bureaux de vote partiellement fermés !

Totalement convaincu par les conclusions de son rapporteur public engageant les citoyens à savoir « faire des efforts » pour conquérir la démocratie, le CE n’a pas annulé l’élection départementale du canton de Marseille 6 quand bien même 12 de ses 37 bureaux de vote avaient ouvert très tardivement (jusqu’à près de 4 heures après l’horaire légal). La sincérité du scrutin n’en aurait pas été altérée.

Il faut dire que les conclusions du rapporteur public (T. Pez-Lavergne) étaient singulièrement soutenues et argumentées. Alors que tout aurait pu a priori convaincre le CE de la nécessité d’une annulation des opérations électorales, ce qu’avait d’ailleurs matérialisé un jugement en premier ressort du TA de Marseille en date du 1er février 2022, le Palais royal s’est laissé convaincre par la position inverse. Entre l’avenue marseillaise des olives et Plan-de-Cuques, globalement autour du 13e arrondissement, est planté le 6e canton litigieux. Or, en juin 2021, l’un des binômes non élu lors du scrutin du 20 juin 2021 a fait état de plusieurs irrégularités manifestes, au regard notamment de l’art. R. 41 du Code électoral et en a demandé l’annulation conséquente. Il faut dire que les faits étaient impressionnants : au lieu d’être ouverts (selon l’art. préc.) de 8h à 18h de façon principielle (et parfois 20h sur dérogation préfectorale), 12 des 37 bureaux de vote du canton de Marseille 6 n’avaient pu accueillir le public des électeurs qu’en retard lors du premier tour de scrutin : « trois bureaux ont ouvert avec un retard d’un quart d’heure à vingt minutes environ (bureaux n°1345, 1367 et 1369), un bureau de vote a ouvert avec un retard de cinquante minutes (bureau n°1370) tandis que l’ouverture des huit autres bureaux de vote est intervenue avec un retard allant de deux heures et quinze minutes à trois heures et quinze minutes. Ainsi, le bureau de vote n°1340 a ouvert à 10h15, cinq bureaux de vote ont ouvert à 10h30 (bureaux n°1332, 1336, 1349, 1373 et 1365), le bureau de vote n°1371 a ouvert à 11 heures et le bureau de vote n°1374 a ouvert à 11h15 ». Avant que le lecteur citoyen parisien ne fasse de remarque perfide à l’égard d’une attitude sudiste et méditerranéenne consistant à prendre quelques retards dans les actions même officielles, soulignons qu’il n’en était ici rien. Il résultait en effet « de l’instruction que le retard important dans l’ouverture de ces bureaux [était] dû à l’absence des présidents et du matériel de vote, quarante présidents désignés par la ville de Marseille ne s’étant pas présentés la veille du scrutin pour récupérer le matériel de vote en mairie ». On s’attendait donc, reconnaissons-le, à ce que le juge sanctionnât sévèrement (…)

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