Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative.

Voici un extrait du prochain numéro :

CE, 10 octobre 2022, Association DIGNITAS – Vivre dignement – Mourir dignement (N° 465977)

Du refus d’instrumentaliser la QPC pour obtenir la création d’une nouvelle Loi

L’une des difficultés qu’entraîne l’emploi de la notion de dignité de la personne humaine est qu’elle charrie avec elle, s’agissant spécialement de personnes vivantes, une inévitable prise de subjectivité selon celui, celle ou ceux qui l’invoquent. D’aucuns trouveront ainsi « digne » de ne pas permettre l’euthanasie quand d’autres revendiqueront la dignité de mourir volontairement de façon assistée aux fins de ne plus souffrir. Outre ce contexte délicat, s’ajoute à l’espèce ici résumée un emploi du Conseil constitutionnel et de la Qpc (question prioritaire de constitutionnalité) que critique formellement le Conseil d’État en ce que cette dernière n’a pas pour objet de militer en faveur d’une création normative.

La requérante est l’association suisse médiatique Dignitas dont l’un des objets sociaux assumé est « l’accompagnement en fin de vie et l’aide au suicide (suicide accompagné) ». Contestant en excès de pouvoir la légalité des arts. R. 4127-37 et s. du Code de la santé publique (Csp) au nom d’un droit « pour chacun de pouvoir mettre fin à ses jours consciemment, librement et dans la dignité », elle a assorti sa demande d’un renvoi au Conseil constitutionnel d’un examen, par QPC, de la constitutionnalité des arts. L. 1110-5 à L. 1110-5-3 Csp. Selon la requérante, « ces dispositions, en tant qu’elles s’abstiennent d’instituer des garanties légales de nature à permettre à chacun, au moment de son choix et en dehors de toute situation d’obstination déraisonnable ou de fin de vie, de pouvoir mettre fin à ses jours  » consciemment, librement et dans la dignité « , porteraient atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, au droit au respect de la vie privée, au  » droit à l’autonomie personnelle  » et au  » droit de mourir dans la dignité  » ainsi qu’au principe de fraternité et à la  » liberté d’aider autrui dans un but humanitaire  » qui découlerait de ce principe et que le législateur, en adoptant les dispositions de ces articles sans organiser l’exercice d’une telle faculté, aurait méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant par elle-même les droits et libertés invoqués ». En plein contexte normatif annoncé de nouvelles normes en la matière et alors que la société s’enflamme pour ces questions entre éthique et droit, le juge administratif rappelle que son homologue constitutionnel, (…)

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