Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative.

Voici un extrait du prochain numéro :

CÉ, 6 octobre 2022, Centre hospitalier de Vichy (req. 446764)

Responsabilité publique pour fautes médicales : la protection par le service public

A priori, quand un praticien hospitalier exerce en établissement public de santé à titre libéral, les obligations le liant à ses patients relèvent du droit privé. Toutefois, par une interprétation généreuse des obligations de service public hospitalier (et potentiellement des manquements fautifs à ces dernières), le Conseil d’État, tout en rappelant la possibilité pour l’établissement public d’actions récursoires, va ici consacrer une responsabilité publique de l’hôpital dans lequel une opération chirurgicale a eu lieu et qu’il va considérer comme objet principal du dommage litigieux malgré l’existence de fautes médicales (de diagnostic) préalables en seul secteur libéral. Y sont alors matérialisées deux fautes à la charge première du service public : dans l’indication thérapeutique et dans l’obligation d’information.

A la suite d’examens médicaux réalisés en secteur libéral par un praticien hospitalier, un citoyen a été hospitalisé en secteur public dans l’établissement public dans lequel pratique, à titre principal, le médecin et y a subi une importante chirurgie. « Estimant que des fautes liées au retard de diagnostic de sa maladie osseuse, au choix de l’indication thérapeutique dont la mise en oeuvre était de nature à favoriser l’essaimage de cellules cancéreuses dans les tissus mous et à un manquement quant à l’obligation d’information préalable à cette intervention, avaient été commises, M. C… a saisi le TA de Clermont-Ferrand d’une demande de réparation dirigée contre l’établissement de santé ». Trois fautes étaient alors identifiées par la victime et ses ayants-droits : l’une dans le diagnostic tardif, l’autre dans la matérialité du choix thérapeutique et enfin en matière d’obligation estimée défaillante d’information. Le TA saisi n’a considéré que la deuxième mais, en appel, la CAA de Lyon a condamné l’hôpital à l’indemnisation des deux derniers manquements. Comme les juges du fond lyonnais, pour consacrer, en cassation, la responsabilité publique hospitalière, le juge va d’abord rappeler (…).

(…)

Les théoriciens taquins (si, si, il y en a) du droit de la santé, noterons que le Conseil d’État, dans ses abstracts, relève et qualifie la présence d’un « service public de santé » (expression qui n’apparaît pas dans la décision) vraisemblablement pour évoquer celle d’un établissement public de santé. Toutefois, en ne parlant pas de service public hospitalier (terme consacré), ne rouvre-t-il pas le débat sur l’existence même d’un service public global de santé dépassant la mission spéciale hospitalière ? On adorerait le croire même si l’on imagine davantage une erreur de clavier.

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