Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative. Voici deux extraits du prochain numéro :

CE, 05 juin 2019, M. A. (424886)

Mention non répétée des délais d’actions en responsabilité & conciliation

En avril 2017, un citoyen a été admis dans un service de réanimation et, le 11 mai suivant, alors qu’il allait quitter l’établissement public de soins, a indiqué à l’administration que les préjudices qu’il déclarait avoir subi pendant cette hospitalisation devaient être pris en charge. En novembre 2017, l’APHP a rejeté sa demande et le lendemain de la réception dudit refus, l’intéressé a saisi la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) territorialement compétente. Toutefois, et en application de l’art. R 1142-15 du code de la santé publique, la CCI a considéré le 19 janvier suivant que « la condition de gravité minimale requise » et justifiant sa compétence « n’était pas requise » et s’est donc déclarée matériellement incompétente. Toujours désireux de rechercher un règlement amiable, l’ancien patient a demandé, le 26 du même mois, à procéder à une conciliation mais l’APHP en a refusé le principe ce qui a donné lieu, le 8 mars 2018, à un constat de non-conciliation émis et notifié par la CCI à l’intéressé. Au premier juin suivant, M. A. a conséquemment saisi le juge administratif en référé afin qu’une expertise soit matérialisée et statue sur les préjudices litigieux. Au 6 juillet suivant, le TA de Paris lui a donné satisfaction mais la CAA et, ici en cassation, le CE vont conclure à l’annulation de cette ordonnance première de référé et ce, faute de délai d’action contentieuse respecté. En effet,

(…)

Voilà une décision bien peu protectrice des intérêts des patients et l’on peine à comprendre comment le Conseil d’Etat a préféré retenir cette version pro administrative plutôt que celle qui aurait consisté à affirmer que la CCI – dont c’est la mission même – aurait pu et dû indiquer à nouveau (ce qui ne lui coûte rien) les mentions de délais. Il nous semble très paradoxal d’inciter toujours plus les citoyens à éviter le contentieux en multipliant voies administratives, amiables et arbitrages lorsqu’au final, les administrés qui acceptent ces actions non juridictionnelles le paient parce qu’une administration et un juge n’auront – cette fois – pas été formalistes.

CE, 03 juin 2019, Mme J & M. A. (414098)

Prise en compte du préjudice moral des ayants droits : le cas des « nouveaux » conjoints

Depuis la Loi du 9 août 2004, l’indemnisation des ayants droit de personnes décédées en raison « d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale » a été ouverte, par le jeu de la solidarité nationale, « aux proches de la victime, qu’ils aient ou non la qualité d’héritiers » et « qui entretenaient avec elle des liens étroits, dès lors qu’ils subissent du fait de son décès un préjudice direct et certain ». La Loi – ici appliquée aux profits de « nouveaux conjoints » d’anciens époux divorcés et parents d’une enfant malheureusement décédée d’un accident ischémique, n’indemnise donc plus les seuls héritiers et ayants droit formels ou premiers ce que la CAA de Bordeaux avait pourtant refusé. En cassation, donc, le CE va promouvoir deux formes de préjudices désormais indemnisables et recevables à ce titre :

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Pour celles et ceux, dont nous faisons partie, qui plaident en faveur de la reconnaissance des droits du cadavre et de sa personnalité, voilà encore un pas d’effectué et l’on s’en réjouira.

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