Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques arrêts et jugements de la jurisprudence administrative. En voici un extrait :
CE, 09 mars 2012, Commune de Mionnay (avis – n° 354114)
Indemnisation des frais de formation du fonctionnaire territorial : la nouvelle espadrille
La « pantoufle » est cette somme payée par un haut fonctionnaire à l’Etat lorsqu’il désire, contrairement à son engagement initial, poursuivre sa carrière dans des cadres privés et ce, alors qu’il a bénéficié d’une formation payée par le contribuable français. Aux côtés de ce pantouflage, désormais limité, existe désormais depuis la Loi du 19 février 2007 (art. 51 modifié de la Loi du 26 janvier 1984), pour la première fois ici devant le contentieux, un autre type de paiement, plus léger et public, auquel on pourra donner le nom, heureux en ce début de Printemps, d’espadrille. Celle-ci est en effet la somme qu’une collectivité publique doit payer si elle recrute un fonctionnaire territorial moins de trois ans après sa titularisation à la collectivité (ou à l’établissement public) d’origine de l’agent qui a, précisément, matériellement contribué à la formation de celui-ci. Si l’on ne veut avoir mal ou trop chaud aux pieds, l’espadrille est nécessaire mais elle est souple et saisonnière ce que précise le Conseil d’Etat saisi pour avis en application de l’art. L 113-1 du CJA par le tribunal administratif de Lyon (jugement n°0906432 du 02 novembre 2011).
Nécessaire. L’espèce originelle oppose les communes de Mionnay et de Mézériat à propos du remboursement, par cette première, des frais de formation d’un agent territorial supportés par la seconde. Alors, affirme le Conseil d’Etat, il ne s’agit pas d’une faculté mais d’une nécessite : la question de l’indemnisation doit être expressément tranchée et faire l’objet d’un accord explicite. Un silence en la matière ne saurait valoir acquiescement ou refus de prise en charge car cette dépense est une créance qui « présente un caractère obligatoire ».
Souple. Toutefois, la caractéristique de l’espadrille est sa souplesse. Si l’accord est nécessaire et heureux pour les deux collectivités qui ne peuvent faire mine de négliger cette question, il peut impliquer non seulement une somme inférieure à celle prévue par la norme (c’est-à-dire la somme des rémunérations perçues par l’agent et les éventuels frais de formation complémentaires supportés) mais encore une somme nulle. L’important est la matérialisation d’un accord qui devra faire état des motifs d’une indemnisation réduite voire inexistante. A défaut, c’est la somme maximale légale qui sera versée.
Saisonnière. Enfin, précise le Conseil d’Etat, si la créance prend naissance « à la date d’effet de la mutation » de l’agent et n’est encadrée dans aucun délai particulier, cela signifie qu’elle est soumise à la prescription quadriennale de droit commun. L’espadrille est ainsi nécessaire, souple mais ne dure qu’un temps.
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