Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative.

Voici un extrait du prochain numéro :

TA de Toulouse, 15 sept. 2021, Ordo., X et Y. c. commune de Bagnères-de-Luchon (2105315)

Atteinte réelle mais ni manifeste ni urgente à la Laïcité du service public thermal

La présente ordonnance, rendue à la suite d’un référé-liberté (art. L. 521-2 CJA) provoqué par des citoyens cherchant à empêcher la participation de la commune de Bagnères-de-Luchon à une manifestation religieuse, mérite toute notre laïque attention tant elle est construite sur un étonnant paradoxe. Le 12 septembre dernier, des requérants ont provoqué un recours juridictionnel tendant à ce qu’il soit enjoint à la puissance publique communale précitée de ne pas participer sinon coorganiser une manifestation devant se produire le 19 suivant sur son territoire et consistant en une bénédiction religieuse catholique des eaux thermales ; eaux traitées et gérées par le service public thermal, en régie municipale, desdites eaux (l’établissement public des thermes de Luchon). A priori, et dans un premier temps même de l’ordonnance, la contrariété aux principes de Laïcité et de neutralité semble convaincre le juge toulousain qui applique pour ce faire, et vraisemblablement pour la première fois en France, l’art. 1er de la nouvelle Loi dite « séparatisme » du 24 août 2021 (ré)imposant à tout service public de veiller au respect des principes précités. En ce sens, relève la décision, puisque l’établissement thermal est un service public, il lui appartient « vis-à-vis notamment de ses usagers, qu’ils aient ou non une conviction religieuse et quelle que soit leur conviction religieuse » de ne pas contrarier la neutralité (en l’occurrence religieuse) et la Laïcité des thermes. Or, affirme explicitement le juge des référés, (…)

On peut surtout s’étonner de ce que le juge ne retienne pas ici l’apparence manifeste de participation communale au regard de la communication faite de la bénédiction des eaux et l’on n’imagine pas un instant que la mairie n’en ait pas été informée même si elle n’a pas donné d’ordre d’apposer les logotypes publics litigieux. A titre de comparaison, si la bénédiction avait été faite par un imam, en aurait-il été de même ? En tout état de cause, on sait désormais, même sans « bénédiction » communale que toute religion peut donc, à Bagnères-de-Luchon, invoquer le même droit. Enfin, on reste également pantois quant à la mention pré-cognitive du juge qui retient que l’établissement public ne se prévaudra pas de l’événement dans l’avenir à la manière de Philip K. DICK dans son Minority report (1956) jugeant de faits non déroulés mais seulement imaginés par le juge en toute « bonnes fois » de sa part et de celle du service public thermal.

source (sic) de l’image : https://www.paultian.fr/2021/09/polemique-sur-la-benediction-des-eaux-thermales-pour-eric-azemar-maire-de-luchon-louis-ferre-a-une-memoire-selective.html

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