Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques arrêts et jugements de la jurisprudence administrative. Voici un extrait du prochain numéro :

CAA de Paris, 22 septembre 2023, Commune de Bagnolet (22PA02509)

BEA cultuel laïque mais pas ses facilités de paiement

Parmi les exceptions, incohérences ou torsions réalisées au principe – que nous qualifions conséquemment de « latitudinaire » – de Laïcité, existe la possibilité – au nom de la liberté religieuse – que les cultes (organisés en associations cultuelles type art. 18-19 de la Loi de 1905) obtiennent de la puissance publique la réalisation d’édifices cultuels sur des terrains publics au moyen de baux emphytéotiques administratifs (BEA) (art. L 1311-2 et s. Cgct). Si cette pratique ayant déjà permis la construction, comme ici, de mosquées est légale et que s’y ajoutent, même (art. L. 2252-4 Cgct), des possibilités de garanties publiques des emprunts cultuels « répondant à des besoins collectifs (sic) de caractère religieux », cela ne permet pas (encore) à la puissance publique d’accorder à titre gratuit des facilités de paiement susceptible d’être qualifiées de financements cultuels indirects.

Dans ce conflit, en outre, existait une autre difficulté puisque la commune (de Bagnolet) et l’association cultuelle (ABFB) entendaient résilier le BAE de façon anticipée par une cession du terrain litigieux à hauteur de 950 000 €. Cela dit, va estimer le juge parisien (confirmant l’analyse du TA de Montreuil en première instance), ce n’est pas cette question qui était problématique ni même l’existence première d’un BAE d’« édification d’une mosquée sur un terrain communal », bail « consenti pour une durée de soixante-trois ans » avec transmission de droits réels sur l’immeuble mais uniquement les modalités et facilités proposées de financement. En effet, outre l’invocation d’un non-respect du droit à l’information des membres du conseil municipal (art. L 2121-12 CGCT) qui aurait dû impliquer de la part de la commune la transmission préalable à la délibération litigieuse de plusieurs éléments, ce qui retient surtout l’intérêt des juges parisiens – ici – est l’atteinte au principe dit constitutionnel de Laïcité au moyen d’un financement cultuel indirect. Concrètement, au visa notamment des art. 2 et 19 de la Loi du 9 décembre 1905, la CAA de Paris retient, outre la dérogation permise aux BEA, (…)

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