Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques décisions de la jurisprudence administrative.
Voici un extrait du prochain numéro :
CE, 14 octobre 2022, B & C (élections départementales des Ardennes) (N° 465708)
Il existe encore des formalités substantielles dont le juge sanctionne l’atteinte
La jurisprudence administrative des dix dernières années a appris (à la suite de la jurisprudence dite Danthony ; CÉ, Ass., 23 déc. 2011 ; Rec. 649) que les vices de procédure (surtout) et de formes étaient en train de dépérir devant le prétoire publiciste puisque, désormais, le juge a – de sa seule et propre initiative – décidé de n’en sanctionner que certains ayant une influence sur le sens de la décision prise et privant ainsi les requérants de garanties. Pensant peut-être qu’un « simple » défaut de signature pouvait, à l’aune de ce mouvement peu formaliste, être aisément régularisable, deux élus départementaux ont appris de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), ainsi que du CE le confirmant, qu’il fallait – cette fois – respecter strictement les formalités imposées.
La présente affaire concerne l’examen des comptes de campagne par la CNCCFP d’un binôme de candidats aux élections départementales ardennaises du canton de Sedan 3. Repoussant leurs documents comptables, la commission en a saisi le TA de Châlons-en-Champagne qui a confirmé le rejet des comptes et l’inéligibilité temporaire conséquente des citoyens peu formalistes ce dont ils avaient interjeté appel auprès du Conseil d’État. Matériellement, il leur était reproché de ne pas avoir signé, formalité substantielle, les documents litigieux. Au fond, le TA avait indiqué « que la seule production, en cours d’instance, d’une photographie du compte de campagne signé par les deux candidats était insuffisante pour apporter la preuve que le défaut de signature avait été régularisé devant la commission ». Et, en statuant pareillement, assure le CÉ, il avait « suffisamment motivé son jugement ». En outre, estime le juge d’appel, (…)
Malheureusement, si l’on pourrait a priori se réjouir de ce respect réaffirmé du formalisme instauré, on remarquera que, tant dans la jurisprudence Danthony préc. que dans le présent arrêt, c’est au détriment seul des requérants, et non de l’administration qui n’en est aucunement sanctionné, que cela joue. Autrement dit, l’administration peut ne pas être formaliste mais les administrés eux, doivent l’être.
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