Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques arrêts et jugements de la jurisprudence administrative. Voici un extrait du prochain numéro :

CE, ord., 15 novembre 2017, Commune d’Aix-en-Provence & SEMEPA (409728, 409799)

Suspension confirmée du montage contractuel aixois du service public de stationnement

La Provence est connue pour ses panisses et ses Pastis, ses savons et ses huiles d’olives mais aussi pour ses montages contractuels parfois complexes et parfois même illégaux. Au fond, on ne sait pas encore s’il en est ainsi du montage opéré entre la Commune d’Aix-en-Provence et l’une de « ses » sociétés d’économie mixte (la SEM d’équipement du Pays d’Aix (SEMEPA)) car la décision ici présentée ne concerne qu’un référé de cassation confirmant une suspension d’exécution conventionnelle mais cette ordonnance étant prise en raison de deux doutes sérieux quant à la légalité de la convention litigieuse, on voit mal comment les juges du fond pourraient, après le Conseil d’Etat, ne pas relever d’illégalités. La décision est des plus intéressantes à plus d’un titre tant les questions de droit y sont multiples et interrogent tant le droit de la commande publique que celui des biens mais encore des collectivités territoriales et même du contentieux. A l’origine, figure une convention du 09 juin 2016 passée entre la commune d’Aix-en-Provence et l’une de ses SEM portant « résiliation partielle » d’une première convention de 1986 relative à l’exploitation de services publics aixois de stationnement et prononçant la promesse de vente sous conditions notamment de déclassement desdits parcs de stationnement appartenant au domaine public communal. Suite à la connaissance de cette convention de 2016 qui a été entourée d’une importante communication aixoise, le représentant de l’Etat dans le département, au moyen d’un déféré préfectoral au visa des art. L 2131-6 CGCT et L 554-1 CJA, en a demandé la suspension. Cette dernière a été ordonnée en référé tant par le TA que par la CAA de Marseille. Les deux parties cocontractantes se sont conséquemment pourvues en cassation. Après avoir rappelé qu’en déféré, la suspension était engagée sans la condition habituelle d’urgence mais uniquement au regard de doute(s) sérieux quant à la légalité de l’acte attaqué, le CE va rejeter les deux motifs sur lesquels s’étaient fondés le TA et la CAA. En effet, affirme le juge de cassation, même si l’ord. du 19 avril 2017 a sous conditions permis à l’avenir les promesses de vente de biens du domaine public, avant sa mise en œuvre, rien ne s’opposait à ce que, sous conditions suspensives de déclassement notamment, un bien public fasse l’objet d’une telle promesse. L’invocation de l’inaliénabilité domaniale ne suffisait donc pas. Par ailleurs, au regard des art. L 5217-1 & L 5218-2 CGCT notamment, s’il est vrai qu’au 01 janvier 2018, la compétence relative à la création et la gestion du service public de stationnement sera bien transférée à l’intercommunalité, jusqu’à cette date – fut-ce de manière transitoire – la commune demeurait compétente. L’invocation d’une incompétence n’emportait donc pas davantage de doute sérieux quant à la légalité de la convention litigieuse.

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Par ailleurs (et comme si cela ne suffisait pas), le CE relève que la communication officielle de la commune provençale assumait et revendiquait le fait que l’objet de cette convention de 2016 était de « se soustraire à l’obligation de céder (…) ses parkings » à l’intercommunalité « ce que la Loi imposait » au visa de l’art. L 52182- CGCT précité. Conséquemment, la convention ne pouvait-elle être appréhendée qu’à l’instar d’un acte ayant un objet illicite visant à matérialiser un manifeste « détournement de pouvoir ».

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